Histoire urbaine - petite et grande histoire - art et architecture modernes - bâtiments anciens - jardins et villas - ateliers et industrie - musées et loisirs  du 20è arrondissement (côté Belleville et Ménilmontant)

Bientôt en allemand

Le Bas-Belleville

Belleville
Les ruelles, les ateliers, les cités-jardins conservent la mémoire du double passé de Belleville, rural et ouvrier. Le village formé au Moyen Age sur les coteaux viticoles des grandes abbayes parisiennes prend son nom au 18è s, probable déformation de Belle Vue, et devient le royaume des guinguettes : les Parisiens y viennent le dimanche boire un petit vin, le guinguet. Ses 128 m en font le château d'eau de Paris, d'où partent de nombreuses sources. A partir de 1840 Belleville est incluse dans les nouvelles fortifications défensives de Thiers : la commune s'urbanise rapidement, accueillant dans des maisons de rapport de mauvaise qualité les ouvriers chassés après 1852 par les grands travaux de Haussmann. En 1860, lors de son rattachement à Paris, Belleville est coupée en deux pour "désunifier" la commune frondeuse et son ancienne grande rue (rue de Belleville) marque désormais la frontière entre les 20è et 19è arrondissement (voir le 19è pour le Belleville situé autour des Buttes-Chaumont et la place des Fêtes). Les nouveaux habitants se rallient à l'insurrection de la Commune en 1871 et ses barricades sont les dernières à tomber. Le quartier décimé passe de 50 000 à 30 000 habitants.

Au 20è s, Belleville devient un quartier d'immigration : dans les années 1920 s'établissent des Arméniens, des Grecs, des Juifs polonais (qui travaillent dans la confection et la chaussure), alors que le quartier a été inscrit dans la liste des îlots insalubres en 1918. A partir des années 1960, tandis que les anciens déménagent souvent dans les nouveaux HLM confortables de Sarcelles ou de Créteil, de nouveaux immigrés d'Afrique du nord (Algériens et Tunisiens juifs) s'installent dans les vieux immeubles qui doivent être détruits par la rénovation et ne sont donc pas entretenus. Sporadique, cette rénovation se traduit alors dans des tours et barres caractéristiques des années 1960. Dans les années 1980 arrivent des Africains d'Afrique noire et des Asiatiques, qui rachètent les baux commerciaux, mais n'habitent pas forcément dans le quartier. A cette époque là s'installent aussi deux nouvelles populations : des classes moyennes "françaises" à qui l'on a attribué un logement social sans qu'elles aient choisi Belleville et qui souhaitent une "banalisation" du quartier et des commerces, et des jeunes artistes et cadres moyens qui s'y installent justement pour la diversité culturelle et l'aspect ancien du bâti, mais qui attirent les promoteurs en quête de plus value, surtout avec la spéculation de 1986-89 (le % d'ouvriers est passé de 51 % à 25 %, entre 1954 et aujourd'hui). D'où parfois certaines tensions, dont témoigne l'histoire de la Bellevilleuse.

Cette diversité est évidente dans les commerces et le grand marché qui se tient les mardis et vendredis matins entre les stations de métro Belleville et Ménilmontant.

(Départ du métro Belleville...)
1- Logements sociaux, 100 bd de Belleville
(architecte Frédéric Borel, 1989)
L'architecte a voulu créer une "sculpture ouverte sur la ville". L'animation de la ville entre par la "cour-rue" et par les coursives, les balcons, les fenêtres dans les escaliers. Les volumes variés de la façade "invitent à entrer" (toits inclinés vers l'arrière...) et donne un aspect sculptural à l'immeuble. Pour "accentuer l'hospitalité" de la cour, les parois latérales se resserrent pour fausser la perspective et agrandir l'espace. (En face...)

Le Berry-Zèbre, 63 bd de Belleville
(01 43 55 55 55)
Seul cinéma-théâtre du quartier, il avait fermé en 1995, malgré les efforts associatifs pour le maintenir. Il vient de rouvrir comme salle de spectacle (début 2002).

2- Logements sociaux, 24 rue Ramponeau
(architecte Fernando Montès, 1990)
L'immeuble "crée la transition de l'espace public à l'espace privé" par une succession de parcours : hall d'entrée, rue intérieure, passerelles, cours cylindriques dont la cour centrale communique avec celles des immeubles voisins, en une grande coulée qui va jusqu'au boulevard de Belleville, aménagée en jardin de bambous par Chemetov. L'architecte aime les revêtements qui semblent "formés de multiples couches successives" : ainsi, l'acier galvanisé, l'enduit à la chaux blanche cassée en rose clair par de la poudre de marbre.

(En face...)
La Forge, 23 rue Ramponeau
L'ancienne usine de clefs fait partie de la zone d'aménagement du "Bas-Belleville". Elle devait être rasée dans le projet initial de la mairie, mais le bâtiment a été restauré par une vingtaine d'artistes squatters. Dans la deuxième mouture de ZAC (zone d'aménagement concertée) de 1993, la Forge était préservée mais les artistes en place devaient être expulsés pour en faire un centre d'animation municipale, alors que ceux-ci souhaitaient avoir un statut en bonne et due forme. Enfin, décision a été prise par la nouvelle municipalité en 1996 de garder la Forge comme lieu d'animation socio-culturelle du quartier, dans la continuation des ateliers d'art plastique organisés pour les enfants du quartier par l'association Artclefs. Après travaux, les abords sont de nouveau investis d'ouvres d'art.

Logements sociaux, 30 rue Ramponeau
(architecte Frédéric Borel, 1989)
Les deux corps de bâtiment en pierre sont "enchâssés dans un cadre en béton brut, comme dans un écrin", protégés par le toit-corniche. De part et d'autre de la cage d'escalier centrale en creux surmontée d'un "balcon-vigie", les "volumes dialoguent" : à droite les fenêtres sont verticales, tandis qu'à gauche, les ouvertures horizontales soulignent le tassement dû à la pente. Chaque appartement de 100 m2 est conçu autour d'une grande pièce modulable par des panneaux coulissants.
(Presque en face...)

La Bellevilleuse, 33 rue Ramponeau
(tel. 01 46 36 36 16)
Créée en 1989, l'association de quartier s'est opposée aux projets de la mairie de Paris. La mairie souhaitait rénover le Bas-Belleville en détruisant 90% du bâti (depuis longtemps préempté par la ville et laissé ensuite à l'abandon) et en coupant le quartier par une rue et un centre commercial. Contre-expertise maison par maison établissant l'état réel du bâti, information des habitants (le local est presque devenu une antenne sociale...) et des médias, exposition des projets et création d'une maquette, recours auprès du tribunal administratif, lettres, réunions, manifestations, blocage des opérations de démolition, pétitions, ont finalement abouti en 1996, faisant de la Bellevilleuse un modèle de lutte associative pour le cadre de vie... La ZAC a été annulée pour la deuxième fois devant le tribunal administratif, le nouveau projet prend en compte les principales revendications de l'association : relogement des habitants sur place (de tous les habitants de "bonne foi", payant un loyer, même au statut précaire), OPAH complexe pour éviter l'augmentation des loyers, transformation de la Forge (ci-dessus) en lieu d'animation socio-culturelle au service du quartier, DSU (développement social urbain).

Maison de Belleville, 49 rue Ramponeau : c'est donc l'antenne municipale pour la réalisation de l'OPAH.

3- Le parc de Belleville, rue Piat, rue des Couronnes, rue Julien-Lacroix, rue Jouye-Rouve
(métro Couronnes)
(architecte François Debulois, paysagiste Paul Brichet, 1988)
Offrant un beau panorama sur Paris, le parc de Belleville intègre de nombreux éléments symbolisant l'histoire du quartier : une vigne, des grottes artificielles (pour les anciennes carrières de gypse qu'il a fallu stabiliser pour construire le parc), des cascades et des bassins pour rappeler les eaux souterraines. La végétation est à la fois traditionnelle (tonnelle, buis taillés) et moderne. Les deux principales voies transversales du jardin suivent l'ancien tracé de deux rues dont on a gardé les pavés. En 1995 ont été intégrés deux autres vestiges du quartier : le portail de la villa Ottoz et le bas-relief de la crèche La goutte de lait.

Maison de l'air, sommet du parc de Belleville, rue Piat
(métro Pyrénée) (ouverte 13.30-17.00 sauf lundi, fermeture 18.30 le samedi dimanche en été)
La Maison de l'air expose tout ce qui concerne l'air : l'air perçu par les sens, l'air utilisé par les avions, les semences, l'atmosphère terrestre, la respiration etc.

Villa Castel, 16, rue du Transvaal : Truffaut y tourna des scènes du film Jules et Jim.
Prendre juste après à droite le
passage Plantin. Continuer tout droit par la cité Loubeyre. On arrive rue de la Mare.

4- Aménagement des rues "Mare-Cascade"
(architecte
Antoine Grumbach, 1980-1990)
Face à un quartier traditionnel très dégradé, l'architecte Antoine Grumbach a refusé "la destruction pure et simple, autant que la réhabilitation-musée". Pendant les travaux qui ont duré de 1980 à 1990, il a voulu préserver la structure du quartier : les activités artisanales, les faibles hauteurs d'immeubles, les longues parcelles étroites (caractéristiques de l'habitat populaire de l'arrondissement), le tracé des rues le long des courbes de niveau (suivant les anciens chemins maraîchers). Il a rouvert d'anciennes petites voies transversales, réhabilité les bâtiments qui pouvaient l'être et a inséré une dizaine de constructions nouvelles.

Chemin possible : remonter la rue des Mares, tourner à droite rue des Savies (le n° 1 à l'angle est de Grumbach). Au croisement avec la rue des Cascades, la petite place abrite un des anciens regards établis au point de captage des sources ou sur les aqueducs souterrains pour des raisons de surveillance. Prendre à gauche sur quelques mètres : au n° 44 deux souffleurs de verre se sont installés dans la maison de Casque d'Or, héroïne du film de Jacques Becker tourné en décors naturels sur les lieux mêmes du crime. Vers 1900, les "Apaches" faisaient la loi dans les rues de Belleville, soignaient leur tenue et traitaient leurs femmes, telle Casque d'Or, comme des égales.

Interruption pour une petite boucle verdoyante : prendre à gauche la petite rue F. Raynaud, qui débouche sur la rue de l'Ermitage. Tourner à droite puis prendre sur la gauche la Villa de l'Ermitage, rue bordée de maisons. Les maisons continuent au bout dans l'impasse de la Cité Leroy. Remonter un peu la rue des Pyrénées. Au croisement avec la rue de l'Ermitage, tourner à droite : au n° 42 de la rue de l'Ermitage se trouve une minuscule maison de Christope Lab (1989) : c'est une boite en aluminium au couvercle ouvert sur un étage, close en façade par une porte de garage. Revenir par la rue de l'Ermitage pour reprendre la rue F. Raynaud à droite.

Tourner à gauche pour descendre la rue des Cascades. L'autre regard se trouve en contrebas du n° 17. Les n° 9 et 7 ont été construits par Grumbach. Rue de Ménilmontant, tourner à droite, puis de nouveau à droite rue Chevreau. Au croisement avec la rue de la Mare, tourner à gauche : traverser la voie ferrée de la Petite Ceinture, par la passerelle récemment nettoyée en même temps que les talus (Connaître d'autres oeuvres d'architectes de l'opération Mare-Cascade).

On arrive derrière Notre-Dame de la Croix, église de l'ancien village de Ménilmontant.

Ménilmontant

Le quartier de Ménilmontant
Au 18è s, le village de Ménilmontant faisait partie des promenades appréciées des Parisiens, qui venaient y goûter son vin (non taxé par l'octroi). Son nom viendrait de Mesnil Mautemps (maison du mauvais temps), transformé au 16è s en Mesnil Montant, à cause de la pente...   Cette paroisse de Belleville resta séparée de Paris par le mur des Fermiers Généraux et l'octroi jusqu'en 1860, date de son annexion à Paris par le baron Haussmann. Dans ce quartier d'ancienne immigration, de nombreuses boutiques proposent des graines et d'autres produits exotiques. Depuis une vingtaine d'années, le vieil habitat ouvrier a été détruit et remplacé par des immeubles modernes, parfois contestés. La ZAC des Amandiers (de part et d'autre de la rue des Amandiers) est la principale opération de rénovation menée depuis 1953.

(Descendre un peu la rue de Ménilmontant...)
5- Logements sociaux, 44 rue de Ménilmontant
(architecte
Henri Gaudin, 1986)
L'architecte a voulu retrouver "la complexité du tissu urbain, rapprocher les choses, à l'inverse des barres qui les éloignent". Ainsi, "la façade se raccroche à l'alignement des immeubles existants", mais elle en joue aussi : ainsi, les fenêtres suivent "les rythmes et les ordonnancements des immeubles voisins", mais la façade est ponctuée de courbes et de poches qui la dynamisent. La cour intérieure est accidentée pour "renouer avec la tradition des nombreux passages" du quartier.
Vers le haut de la rue, mur peint de Mesnager
.

Descendre jusqu'au 24 rue de Ménilmontant : prendre à gauche la Cité du labyrinthe : c'est une succession de cours, en partie reconstruites, qui permettent de passer rue de Panoyaux (au n° 33-35). On arrive dans le quartier de la ZAC des Amandiers.

ZAC des Amandiers
(située entre le métro Père Lachaise, Gambetta, la rue de Ménilmontant et la rue Sorbier)
Menée depuis 1953 d'abord par l'Etat puis par la société d'économie mixte Semea XV, cette très grande opération de rénovation a conduit à la destruction de la plupart des anciens immeubles, remplacés par près de 2000 logements neufs. Ces nouveaux logements sociaux étaient censés reloger les anciens habitants, d'après les textes. A plusieurs reprises, des manifestations ont abouti à retarder la destruction contestée de certains immeubles. En 1994, le tribunal d'instance ordonnait le relogement de 35 familles considérées à tort comme des locataires sans titre et expulsées de la rue des Partants. Pour sensibiliser les habitants aux problèmes d'urbanisme, une association s'est créée : Archi XX, 49 rue des Partants.
Le quartier est désormais essentiellement composé d'immeubles neufs, assez hétéroclites car datant de plusieurs époques et diversement réussis. Trois exemples parmi d'autres :

(Prendre la rue piétonne qui mène au terrain de sport...)
Crèche et atelier de réparation de mobilier, 7 passage Monplaisir
(architectes Olivier Brenac, Xavier Gonzalez, 1995)
Face au terrain de sport, une austère façade arrière, simple boite recouverte de feuilles de cuivre vert. De l'autre côté, en prenant le passage de Monplaisir, la façade principale se veut "ludique et dynamique" avec sa grande terrasse et ses pare-soleil protégeant la crèche. Inspirés par la cité du Corbusier à Pessac, les architectes ont voulu une "composition géométrique et chromatique" : chaque plan d'un volume a sa couleur propre.

6- Logements sociaux, 9-17 rue Duris
(architecte Ionel Schein, 1984)
C'est une architecture de "pure volumétrie" : aucune décoration ne détourne le regard du "pur jeu des volumes", les fenêtres sont les plus discrètes possible, le carrelage blanc souligne le mouvement (ci-contre).

Ateliers d'artistes, 5 rue des Pruniers
(architecte Michel Mosser, 1975)
Sur une étroite bande de terrain, l'architecte a mis l'accent sur la qualité de la lumière : les verrières supérieures sont "orientées vers le haut, pour supprimer toute vue directe sur la rue et diffuser uniquement la lumière neutre du ciel". Mais l'immeuble est en mauvais état.

[Retour carte de Paris balades]
© 1997-01 Dessillages, tous droits réservés